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7 mars 2016 1 07 /03 /mars /2016 16:39
Nous vivons une époque formidable,

 mais pas spécialement confortable.   

 

Un billet récent évoquait le sens de la vie. Est-ce un thème intéressant ?

 

En fait, l’être humain est régulièrement confronté à la nécessité d’adopter un comportement approprié aux contingences de son existence.

 

Il peut le faire en laissant jouer des réflexes automatiques, sans pour autant s’en rendre compte. Certains d’entre eux sont inscrits dans son patrimoine génétique. Beaucoup ne sont en fait que des réflexes acquis. Depuis son plus jeune âge, chacun d’entre nous a été l’objet d’un conditionnement de fait, plus ou moins structuré, de la part de ses parents, de son environnement proche, de ses éducateurs, des courants médiatiques d’information, de l’adoption au titre de la « pensée magique » de dogmes pour fournir des explications aux surprises qui pourraient le déstabiliser, etc.

Dans la plupart des cas, il est persuadé que son comportement est logique, adapté aux circonstances, alors qu’en fait il est prisonnier de son ressenti.

A ce propos de ressenti, il est intéressant de se référer au fameux « Triangle de Sigaut ». Il établit qu’en fait, l’être humain est à la recherche constante d’un certain confort psychologique en traitant les incohérences qui le déstabilisent. Ces incohérences sont perçues entre son ego, sa perception des réalités, et sa perception du comportement des « autres ». Son ego est quasiment intouchable. Il lui reste à se positionner par rapport aux deux autres pôles et le moyen le plus facile pour le faire est de maquiller les constats en laissant jouer l’auto-persuasion, en choisissant ce que l’on veut voir, et en occultant sous des prétextes divers les constats qui mettent en question son comportement.

Finalement, l’être humain qui adopte ce comportement intuitif est complètement le jouet du monde chaotique qui l’environne, des modes, des pulsions consommatrices, des réglementations, des pensés dominantes, des mythes qu’il vénère, etc. Il est embarqué dans un bateau ivre.

Il semble bien que ce soit le cas d’une grosse partie de l’humanité.

 

L’autre attitude est d’essayer d’inscrire sa réflexion dans une recherche de sens pour la vie humaine, afin d’inscrire son propre comportement dans une continuité cohérente avec ce qui est perceptible d’un futur logique à essayer de percevoir. Mais aussi, il est nécessaire de tenir compte des « autres », car nous sommes tous ensemble sur le même bateau ivre.

 

Existe-t-il des pistes pour aller dans une telle direction ?

 

Depuis le « je pense, donc je suis » et le surhomme de Nietzche, la réflexion métaphysique s’est embarquée dans le nombrilisme. Les « penseurs » ne recherchent plus de guide ailleurs que dans les ressentis de leur ego. Pour eux, c’est là que se niche une Vérité fondamentale. De là à imaginer qu’il peut en sortir quelque chose de cohérent avec toute la variété des nombrils de la planète ! Faudrait pas rêver…

 

Il y a-t-il d’autres pistes ?

 

Un philosophe soigneusement laissé sur la touche a abordé la question. Il s’agit de Pierre Teilhard de Chardin. Il faut dire qu’il cumulait les étiquettes : prêtre, théologien, scientifique reconnu, philosophe à ses heures, bref, un collectionneur de caractéristiques parfaitement incongrues pour la philosophie bien installée, politiquement correcte par rapport à l’existentialisme nombriliste régnant en maître.  

 

Il a décrit l’évolution, spécialement du globe terrestre, comme un arbre, un peu de type araucaria. Un pied enraciné dans la réalité de l’univers pousse vers le haut une tige. Celle-ci s’épanouit en un bouquet de branches poussant horizontalement, et foisonnant dans toutes les directions. A un moment donné, du bourgeon terminal jaillit le prolongement du tronc. Celui-ci à son tour produit une nouvelle couronne de branches, et d’étage en étage, l’arbre pousse vers le ciel.

 

A chaque étage, la nature des branches horizontales évolue. Il s’agit de l’installation d’un monde chaque fois nouveau. Il a ainsi décrit l’évolution comme une croissance par strates empilées, composées chacune de constructions d’un nouveau genre. Elle part d’un point alpha à la base pour aller vers un point oméga, encore quelque peu perdu dans les nuages. Chaque étage progresse horizontalement au prix de l’accroissement de sa complexité, mais il peut abandonner des pans entiers de ses constructions, qui disparaissent, n’étant plus rattachées à rien, tels les dinosaures au sein des de l’animalité.

A la base est la « géosphère », le domaine des matières brutes, avec ses lois physiques, chimiques, tectoniques ou climatiques.

S’y greffe en superstructure la « biosphère », le domaine de la vie, qui s’est lui aussi mis à proliférer par toutes les espèces vivantes ou disparues. 

Son bourgeon sommital est l’espèce humaine, et il s’en dégage une nouvelle strate, la « noosphère » que nous appellerions maintenant la « sphère cognitive », domaine de la réflexion, de l’information, de la recherche de sens aux réalités. Elle est actuellement en train d’exploser dans sa dimension de cumul d’informations, utiles ou non, futiles ou non, objectives ou non, logiques ou non, avérées, fallacieuses, manipulées, trompeuses, … ou non.

Logiquement, une strate supérieure devrait s’y enraciner, le point oméga. Sommes-nous à la veille d’en percevoir la manifestation ?

 

La strate cognitive se développe de façon explosive avec les progrès des techniques de traitement de l’information. La strate biologique est profondément bouleversée par le comportement de l’espèce humaine. La strate géologique subit les effets de cet activisme humain, et l’environnement en est atteint. Nous pouvons avoir l’impression d’une accélération de plus en plus incontrôlée de « l’évolution », donc l’apparition proche d’un fût axial qui va tout bouleverser.

 

C’est une situation exceptionnelle, les prémisses d’un ordre nouveau. C’est une époque formidable du point de vue de l’évolution, mais pas nécessairement facile à vivre pour nous.

 

La modélisation proposée par Teilhard de Chardin date un peu. Les réalités et les connaissances scientifiques ont sensiblement évolué depuis qu’il a décrit « Le phénomène humain ». Sans doute un petit coup de plumeau sera-t-il nécessaire pour essayer d’y voir plus clair. Est-ce une piste pour la recherche d’un sens à la vie ?

 

 

… Esope … 

commentaires

A
Il me semble que cet acquis élargit considérablement le champ des possibles, risques compris. Il n'y a pas de fatalité à cette soumission hypnotisée que vous ressentez. L'indocilité cyclique du bétail humain nous permet d'espérer et de travailler à d'autres orientations.
Répondre
A
La recherche d'un sens à la vie est un acquis de la noosphère, comme la notion de point Omega. Existent-ils sans cet humble support pensant de tous ces acquis, avec ses gènes, ses plaisirs, ses errements, et ses basses ou sublimes aspirations?
Répondre
E
Si c'est un acquis, ne risque-t-il pas d'être étouffé sous l'avalanche d'images de rêve qui ôtent tout sens critique, qui magnifient le ressenti quel qu'il soit ? Le point oméga pourrait-il être simplement la soumission hypnotisée à une intelligence (complètement artificielle ou non) utilisant tous les artifices de séduction et de contrainte douce, et utilisant l'humanité comme un bétail docile ne servant qu'à l'alimenter ?

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  • Ahuri par certains comportements, allergique au prêt-à-penser et narquois à l'égard du politiquement correct.

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