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25 août 2013 7 25 /08 /août /2013 16:44

champagne 1

 

Olivier Berruyer et Paulin Ismard, même combat ?

 

Dans sa facette socioéconomique, la blogosphère, en particulier au travers du blog d’Olivier Berruyer, « Les-Crises », fournit un écho au « Manifeste des chrétiens indignés ». Ceci rejoint les prises de position de Martin Hirsch et de bien d’autres sur les dérives du système socioéconomique actuel.

Le magazine « Le Point » du 22 août, publie une interview de Paulin Ismard à propos de son ouvrage sur Socrate et le climat social de son époque. Où est le rapport ?

 

Cette synchronisation de publications permet de relever des similitudes intéressantes entre la République antique d’Athènes, réputée démocratique, et notre système politico-économique à bout d’inspiration.

 

Résumons.

Socrate a dénoncé les dérives de la société athénienne par rapport aux principes dégagés par Solon, et proposé un ressourcement sur les valeurs sociétales en proposant à ses élèves une réflexion sur eux-mêmes et sur les rapports entre individu et collectivité. Les pouvoirs en place se sont sentis menacés, ont dénoncé une manœuvre sectaire de corruption de la jeunesse et l’ont condamné à boire la cigüe.

Le Mouvement des Chrétiens Indignés dénonce la fracture sociale toujours grandissante et les aberrations d’un système socioéconomique qui détruit à la fois l’équilibre écologique de la planète et l’équilibre psycho-social de la majeure partie de la population terrestre. Il publie un manifeste qui reflète les valeurs évangéliques actuellement cantonnées aux abonnés absents. Les pouvoirs en place, s’ils y portent une quelconque attention, ne peuvent qu’y voir une manœuvre sectaire de déstabilisation du système, lourde de risques a priori, surtout pour leurs intérêts. Mais ils ne peuvent que jouer l’indifférence car le Christ a déjà été condamné et exécuté, il y a deux-mille ans de cela.

 

Dans les deux cas, la Nation en cause est confrontée à une destruction progressive de ce qui avait permis son positionnement international. Dans le cas de Socrate, la République athénienne courait toute seule, en échappée. Dans notre cas, le pays roule en peloton car la mondialisation est intervenue entre temps.

 Dans les deux occurrences, les « mythes fondateurs » se sont évaporés. Au fil du temps. il se crée un décalage progressif entre les valeurs sociétales de référence et les réalités triviales. Dans les faits, il apparaît que le système socioéconomique fonctionne comme un outil de pouvoir au service d’une minorité réduite et au détriment des plus faibles. Il installe de nombreux déséquilibres dont la pesanteur s’oriente d’un côté, toujours le même, celui des faibles, et dont les avantages vont toujours aussi aux mêmes, ceux qui tiennent les manettes du système.

Quand les avantages peuvent être attribués au mérite, autrement dit à des activités dont tout le monde profite, les déséquilibres sont acceptés, jusqu’à la limite du psychologiquement tolérable. Mais qu’est-ce que le psychologiquement tolérable ? C’est tout simplement ce qui est en accord suffisant avec les valeurs partagées. Si le système de repères disparaît, ou est bafoué par les réalités, le malaise s’installe et s’auto-entretient. 

Dans les faits considérés, la preuve du mérite dont se targuent les « avantagés » est inexistante. Le plus souvent leurs avantages tiennent en gros à deux causes, séparées ou combinées chez un même individu. D’un côté, c’est la chance, celle en particulier d’être né du côté des possesseurs de richesses matérielles ou statutaires, celle d’appartenir à la minorité où la mise de départ dans la vie active permet de consommer aux dépens de la collectivité en ne lui laissant que des contraintes, sans contrepartie objective. De l’autre, c’est leur absence de scrupules et leur habileté à berner les valeurs spirituelles considérées officiellement  comme respectables, par ailleurs utilisées par eux comme un bouclier.

 

A l’examen, le fonctionnement politico-économique d’un système en crise se révèle, selon les pays, quelque part entre une oligarchie au service d’un clan très réduit et une prétendue démocratie, engluée dans le clanisme et la démagogie utilisés de façon industrielle par une minorité de  privilégiés et c’était déjà le cas dans l’Athènes de Socrate. Les valeurs spirituelles sont exhibées en bandoulière, et les valeurs matérielles sont cultivées avec dévotion  à leur profit par leurs garants institutionnels.

Actuellement, tout le monde est rangé derrière l’étendard de la consommation alors qu’elle n’est dans le discours conventionnel qu’une valeur spirituelle de dernier rang, simplement justifiée par les besoins vitaux (quand ils sont réellement vitaux ce qui reste par ailleurs à établir).

 

Notre pays a choisi comme emblème le triptyque « Liberté-Egalité-Fraternité ».

 

A l’expérience, la valeur Liberté est déclinée essentiellement dans la possibilité qu’elle laisse aux détenteurs de pouvoirs statutaires de différentes natures d’user des droits attachés à leur statut et de les exercer à l’égard des moins dotés.

 

La valeur Egalité est un leurre. Tous les individus sont différents et c’est ce qui crée leur individualité. Sans elles, nous ne serions que des clones évoluant dans une morne uniformité. C’est la variété des caractéristiques humaines qui génère la capacité créative de l’espèce.

Selon les contingences, les capacités individuelles se révèlent plus ou moins efficaces pour dominer la situation personnelle à assumer. Certes, certains sont mieux dotés que d’autres dans les situations courantes. Le phénomène est de plus en plus accentué par la standardisation des pratiques de vie entraînées par la mondialisation et les modes prégnantes. C’est le mimétisme qui inspire les humains (cf. René Girard). Céder à la tentation d’un égalitarisme imposé par les dominants aux dominés pour faciliter leur dominance ne peut conduire qu’à un nivellement global par le bas.

En fait, cet égalitarisme est factuellement exploité pour exciter les envies qui sous-tendent la boulimie de consommation.

 

La valeur Fraternité, elle, est abandonnée à la « redistribution » et à « l’humanitaire ». Elle est souvent un masque pour des objectifs beaucoup moins désintéressés que ne le prétendent leurs promoteurs.

 

Ce choix emblématique résulte des réflexions dogmatiques développées à la période dite « des Lumières », dans un dix-huitième siècle qui ignorait la mondialisation, les grandes découvertes scientifiques, le darwinisme, l’essor technologique, la monnaie scripturale, la communication des informations à la vitesse de la lumière, les produits dérivés, etc.  Dans la foulée, il a été traduit en dispositions systémiques par les penseurs de l’économie politique, à peu près autodidactes puisqu’ils ne disposaient que des réflexions de leurs prédécesseurs, économistes politiques qui fonctionnaient avec d’autres systèmes de valeurs.

Pour donner une unité à leurs débats et propositions, ils ont sélectionné la notion de « richesse » qui n’est que représentative de l’envie d’appropriation ressentie par les individus autres que leur propriétaire du moment. Alors ils ont creusé la notion de « valeur » qui est éminemment subjective et contingente et ils l’ont scindée en deux. D’un côté la notion de valeur d’usage destinée à entreposer tout le contenu subjectif et contingent (donc intraitable), et de l’autre la notion de valeur d’échange, chiffrable, donc pouvant être comptabilisée et exploitée mathématiquement. Tous les systèmes envisagés depuis reposent sur la perception et l’exploitation de l’envie d’appropriation. Ils gèrent les échanges de propriété selon une valeur conventionnelle d’échange qui ne reflète que les niveaux de pouvoir factuel respectif des cédants et acquéreurs, combinés avec la prégnance de leurs envies.

Le système actuel s’est dégagé au fil des expériences comme le bricolage qui facilite le mieux la variété de l’expression des envies et le foisonnement des modalités de confrontation de pouvoir. Le mythe fondateur de notre République et les trois valeurs symboliques qui l’illustrent  ne sont que des breloques.

 

Socrate est un peu loin de tout cela, même s’il y est un petit peu pour quelque chose. Maintenant c’est « la Crise » car le système actuel coince partout en raison des fractures sociales et des limites des ressources planétaires.

 

Le Manifeste des Chrétiens Indignés propose de revoir ce système à partir d’un diptyque « Liberté-Fraternité », les deux étant à « Egalité » et s’équilibrant. C’est logique. Le message évangélique laisse à chacun la liberté de ses options personnelles, ce qui a pour corollaire la prise de responsabilité individuelle. Il offre aussi un vade-mecum comme repère d’orientation, l’amour de son prochain comme de soi-même. Ces deux principes permettent d’arbitrer soi-même, de propos délibéré (et de préférence bien éclairé), entre intérêts collectifs et intérêts individuels.

Evidemment, un tel arbitrage se trouve toujours à devoir s’exercer dans un contexte éminemment subjectif et contingent. Un système socioéconomique qui n’utilise pour éclairer que des données comptables, camouflant dans un emballage opaque les confrontations d’envies individuelles et les rapports de forces, ne semble pas un outil très adapté. Il faudrait trouver mieux.

 

Pour purger la crise, pour réformer le système, pour reprendre le problème à la base, il va falloir probablement ranger les enseignements des « Lumières » (et surtout leurs déclinaisons en système socioéconomique) au rayon des vieilles lunes de leur époque, celui des lampes à huile et de la marine à voiles. Alors, arrivant bien à propos, le manifeste en question me semble un moyen intéressant de lancer l’indispensable débat sur le fond.

 

à plus …

 < http://www.les-crises.fr/ >

commentaires

A
<br /> Les problèmes étant multidimensionnels et mondiaux, les institutions mondiales étant balbutiantes, et chacun cherchant à résoudre des problèmes partiels au niveau local ou national, il y a<br /> effectivement encore du boulot !<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Les seules qui fassent actuellement du multidimensionalisme mondial de façon relativement efficace en manipulant des slogans simples et des concepts complexes, sont les too big to fail<br /> institutions financières multinationales. Mais elles manquent encore de charisme désintéressé !<br />
Répondre
A
<br /> Toute démocratie dont le résultat des élections ne serait pas manipulé pourrait porter au pouvoir un « Messie » soucieux des intérêts de son peuple, multidimensionnaliste, incorruptible<br /> au contact des autres grands de ce monde, et décidé à mettre en œuvre des mesures efficaces en faveur d’une justice d’un ordre supérieur au bénéfice du peuple d’en bas.<br /> <br /> <br /> Mais en politique comme dans la vie privée, il est très difficile de faire le bonheur des gens malgré eux.<br /> <br /> <br /> Si le peuple d’en bas est majoritaire et veut une autre politique que celle qu’il a toujours cautionné, qu’il le dise avec ses votes et se choisisse le bon Messie. !<br /> <br /> <br /> Sinon, c’est qu’il n’est pas majoritaire ou qu’il accepte ce qu’il a toujours connu, ou que ou que…<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Si le multidimensionnalisme ne peut pas obtenir l’adhésion du peuple d’en bas au moyen de quelques slogans simples (ce qui est sans doute antinomique) portés par un Messie charismatique, il<br /> restera un vœux pieux manipulé éventuellement par des technocrates au mieux de leurs intérêts.<br />
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E
<br /> <br /> Si je vous suis bien, pour sortir de l'impasse, il faudrait à la fois trouver un Messie charismatique, manipulant sans esprit manipulateur des slogans simples, et généraliser suffisamment<br /> l'approche multidimensionnelle du système socioéconomique pour fédérer atour de lui ses électeurs en nombre suffisant. J'en suis à peu près d'accord à condition que toutes les conditions soient<br /> remplies.<br /> <br /> <br /> Les candidats Messie charismatique ne manquent pas et une démocratie bien éclairée pourrait faire le tri. C'est plutôt le reste des conditions qu'il s'agit déjà de réunir ou de<br /> susciter. Il y a encore du boulot à faire avant de se mettre en quête d'un hypothétique bon candidat ...  <br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> Nous y voilà !<br /> <br /> <br /> Qui court dans les palaces situés le long des rues pas banales, à Jérusalem ou ailleurs ?<br /> <br /> <br /> Au mieux, un despote éclairé par le multidimentionannalisme, au pire un tyran sanguinaire ou un mollasson épicurien et opportuniste, genre Pilate et son pote Hérode !<br /> <br /> <br /> Mais c’est le passé tout cela ! A moins que la nostalgie du bon vieux temps nous reprenne ?<br /> <br /> <br /> Maintenant, nous sommes en démocratie ! Et si le multidimentionnalisme, sa justice supérieure et un de ses Messies n’intéresse pas les foules, tant pis pour le multidimentionallisme, sa<br /> justice supérieure et son Messie !<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br />
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E
<br /> <br /> Quelle démocratie ? Il y a presque autant de formules concrètes différentes que de capitales, souvent à peu près incompatibles entre elles. Développer une rhétorique convaincante fondée sur<br /> une base factuellement aussi floue est impossible, elle ne reste alors que verbale, de la langue de bois. Et de là à structurer un système politico-économique<br /> efficace, il y aurait encore pas mal de chemin à parcourir !<br /> <br /> <br /> Pour l'instant, la seule quasi-certitude est celle posée par Churchill : le plus mauvais système de gouvernement après tous les autres. C'est léger pour un repère<br /> central de réflexion. Il vaut mieux trouver par ailleurs d'autres point d'appui en complément. La chasse est ouverte.<br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> Et pourtant, le Peuple de Dieu vit maintenant dans un système démocratique où il est possible ce voter pour celui qui mettra toutes ces belles idées en pratiques.<br /> <br /> <br /> Pourquoi le Messie tarde-t-il tant à se présenter, avec une bonne équipe de douze, au suffrage universel pour obtenir la majorité absolue que la pertinence de ses idées mérite ?<br /> <br /> <br /> Parce que son peuple n’en veut pas ou ne le reconnait pas, ne le comprend pas ou n’en voit pas l’utilité? Dans chaque pays, nul ne serait donc Messie ?<br /> <br /> <br /> Tant pis donc pour cette voix qui crie « manifestement » dans le désert ! Elle perd une bonne occasion de côtoyer les grands de ce monde et de tester sa corruptibilité !<br /> <br /> <br /> Tant pis pour le bon peuple qui continuera à subir puisque ses révoltes et révolutions n’ont jamais bénéficié qu’à ceux qui ont pris le pouvoir en invoquant la vox populi, vox Dei !<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Silens populus, silens Deus ?<br />
Répondre
E
<br /> <br /> Vox populi, vox Dei : Pilate s'en lave les mains et libère Barabas, criminel notoire. L'Histoire suit son cours. Notons au passage qu'il récupère le copinage d'Hérode Antipas, comme quoi il<br /> est plus utile, du bon côté de la fracture sociale, d'étoffer son réseau que de se préoccuper d'une justice d'ordre supérieur. Pour les grands de ce monde, la vision n'est pas la même que pour le<br /> peuple d'en bas (bon ou pas). Ce ne sont pas les mêmes combats qu'ils livrent.<br /> <br /> <br /> La vision multidimensionnelle ne court ni les rues banales, ni les palaces.<br /> <br /> <br /> <br />

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